Ce manuscrit présente le travail d’une manière plus cohérente que les esquisses de la collection Meyer de Paris. En considérant l’importance de l’orchestration, les altérations et les corrections : les divergences de la première publication de la partition intégrale, et malgré l’absence de la Danse Sacrale, le manuscrit doit être considéré aussi important et complémentaire à la partition intégrale maintenant en possession de la collection Sacher de Bâle.
La genèse du Sacre est complexe et a été obscurcie par les déclarations erronées du compositeur cinquante ans après la création. « La composition entière du sacre fut complétée au début de l’année 1912, ainsi que presque toute l’orchestration… écrite en partition à la fin du printemps 1912. Les pages finales de la Danse Sacrale furent terminées le 17 novembre. Les danses de la seconde partie furent composées dans l’ordre où elles apparaissent maintenant, et elles le furent très rapidement jusqu’à la danse sacrale que je pouvais jouer main non écrire. »
La composition ne fut pas terminée au début de 1912. En effet ce manuscrit le prouve, car l’œuvre ne ressemble pas à la version finale jusqu’à ce que la Nouvelle Introduction soit ajoutée. Cette partie est signée et datée dans le manuscrit au 19 mars 1913. Cette addition prouve également que Stravinsky n’a pas composé les danses de la seconde partie dans leur ordre final. Bien que ce soit un sujet assez banal que l’introduction puisse être appelée une « danse », l’ordre des tableaux dans la collection Meyer indique que ce fragment de la deuxième partie a été composé d’une manière erratique.
Stravinsky n’arrêtait pas de changer sa musique en la raffinant, en corrigeant ses intentions d’origine à chaque nouvelle expérience de son travail. Le résultat est très compliqué en tant que historique de sa biographie.
Les premières esquisses importantes pour l’œuvre sont dans la collection Meyer. Elles sont datées de la même manière que sur les pages de ce manuscrit en encre rouge : 1911/12/13.
Les esquisses de la première partie cessent à la page 47 dans le manuscrit de Paris. Après, ce sont les esquisses de la deuxième partie qui apparaissent. La page 52 est datée du 1er mars 1912. Il est donc clair que le travail de Stravinsky sur la partie 1 est terminée vers la fin de février. Ceci est confirmé par une lettre à Roerich datée du 6 mars 1912 dans laquelle il écrit « il y a une semaine j’ai achevé la première partie aussi bien que l’orchestration… ». Dans ce manuscrit, la fin de la première partie mentionne comme date : 11/24 Février 1912. Le manuscrit doit contenir un assemblage et une version plus élaborée des esquisses originales, avec plus d’orchestration et plus de détails ajoutés. En bref, avec les esquisses, le manuscrit forme une part intégrale de la première étape de la composition du Sacre.
Avant la première représentation du Sacre, Stravinsky a fait d’autres versions de la partition, dont certaines paraissent avoir été égarées. Celles-ci comprenaient une bonne version de la Part n° 1, faite à la fin de 1912, et début 1913, une version pour piano utilisée pour les répétitions et un arrangement pour deux pianos, ainsi qu’une partition complète, utilisée à la première représentation. Cette dernière devait être une copie du présent manuscrit. La version pour deux pianos a été publiée avant la première mais la partition autographe complète ne fut pas publiée avant 1921 et dans une version révisée.
Il est impossible de donner une liste complète des changements effectués depuis la première version publiée de la partition intégrale. Craft, sans donner de détails sur le manuscrit, a déclaré que « la musique est très différente de la version finale… »
En effet... le manuscrit est très important pour ce qu’il contient mais surtout pour ce qu’il ne contient pas (voir détails dans le catalogue).